LA QUESTION PALESTINIENNE DIVISE LES CAMPUS UNIVERSITAIRES AMéRICAINS

La poussière retombe à l’Université Columbia, à New York, quelques jours après le démantèlement d'un campement propalestinien qui s’était installé sur son campus.

Jadis symbole de la contestation étudiante, l'Université Columbia aura des policiers sur son campus jusqu'au 17 mai, après la remise des diplômes du 15 mai. Celle-ci sera surveillée de près par les forces policières, n'en déplaise aux étudiants et aux professeurs de l'établissement.

L'administration a cédé aux pressions extérieures des politiciens, selon Nadia Abu El-Haj, professeure d'anthropologie depuis 20 ans à l'Université Columbia. Elle juge que l'escalade de violence aurait facilement pu être évitée.

L'administration de l'Université nous a exclus des discussions et a refusé toutes nos offres de médiation, au tout début, pour une désescalade de la situation, déplore-t-elle.

Des présidentes d'université sous pression politique

Lundi dernier, les étudiants ont reçu l'ultimatum de démanteler leur campement, en place depuis le 17 avril, sous peine d'être suspendus de l'Université.

Le même jour, Minouche Shafiq, la présidente de l'établissement, avait témoigné devant le Congrès. Elle avait dû répondre aux accusations d'élus républicains qui lui reprochaient de ne pas en faire assez pour combattre l'antisémitisme sur le campus.

Le président de la Chambre des représentants, Mike Johnson, avait réclamé la démission de la présidente de l'Université Columbia, la qualifiant de faible, et la Chambre avait voté massivement une loi bipartisane sur la sensibilisation à l'antisémitisme, 312 voix contre 91.

Avant Mme Shafiq, il y a quatre mois, la présidente de l'Université de Harvard, Claudine Gay, et celle de l'Université de Pennsylvanie, Liz Magill, avaient dû démissionner après leur passage critiqué devant un comité du Congrès.

L'occupation du pavillon Hamilton

Après l'ultimatum lancé par l'Université, plusieurs étudiants se sont barricadés pendant 24 heures à l'intérieur du pavillon Hamilton. Disclose, divest (divulguer, désinvestir) scandaient les étudiants.

Ils réclamaient le désengagement financier de l'Université à l'égard d'entreprises qui ont un lien avec Israël, de même que de la transparence dans toutes les transactions.

La communication s'était rompue entre les étudiants et la présidence.

Selon Nadia Abu El-Haj, la présidente de l'Université, Minouche Shafiq, a sacrifié les étudiants en « acceptant » les accusations des politiciens d'antisémitisme sur le campus au lieu de les réfuter, de même qu'en faisant appel à la police pour démanteler le campement et déloger les étudiants qui s'étaient barricadés dans le pavillon Hamilton.

Malgré tout, notre détermination est inébranlable pour la libération de la Palestine. Vive les campements en solidarité de Gaza, dit Mélissa.

En plus, l’opinion publique est avec nous. Ce sont juste les politiciens, les médias et le conseil d'administration des universités qui sont stupides, aveugles et sourds aux demandes morales impératives de nos étudiants, soutient M. Khalidi.

Pas de forces extérieures dans le mouvement, selon des étudiants

Les allégations du maire de New York selon lesquelles des forces extérieures se seraient infiltrées dans le mouvement étudiant sont réfutées par certains étudiants.

Je n’en ai pas vu, dit Lily Zuckerman, étudiante à l’Université Columbia. L’Université aurait dû agir plus tôt et faire respecter les règles avant que les choses ne s’aggravent, dit-elle, en ajoutant qu’elle ne s’est jamais sentie en danger sur le campus.

On pouvait circuler facilement et vaquer à nos activités normalement. Je ne me suis jamais sentie en danger sur le campus. C’est sûr que si j’avais été dans le campement, ça n'aurait pas été agréable, mais je n’y allais pas.

Encore un peu secouée par l’intervention policière, Masha Sokolova, une autre étudiante, affirme également ne pas avoir remarqué des gens de l'extérieur.

Juste avant l'intervention policière dans le pavillon Hamilton, la professeure et écrivaine Suzanne Gardinier manifestait devant le portail et se remémorait l'époque où elle manifestait contre l'apartheid en Afrique du Sud, en 1985.

Mme Gardinier soutient que les manifestants de 1985 étaient détestés lorsqu'ils luttaient contre l’apartheid en Afrique du Sud, mais qu'aujourd'hui, les gens reconnaissent qu’ils avaient raison.

Les gens ne reconnaissent pas la situation en Israël. Surtout à New York, c’est une affaire délicate, mais ils vont finir par reconnaître que "c’est l’apartheid en Israël" : la moitié de mes étudiants sont juifs, antisionistes et disent que ce ne sont pas leurs valeurs juives, souligne la professeure.

Université George Washington

Dans la capitale du pays, le campement propalestinien installé sur le campus de l'Université George Washington est toujours en place. Les étudiants se sont débarrassés des clôtures de métal que les policiers avaient placées autour du campus. Elles forment maintenant un tas au milieu du parc. Myriam fait partie des personnes attitrées pour parler aux médias.

Tout près, un jeune homme, torse nu, regarde le campement avec désolation.

Avez-vous vu la pancarte Queer for Palestine? Vous savez ce qu'ils font à ces gens-là en Iran ou à Gaza? me dit-il, découragé. Il s'appelle Charlie, et préfère ne pas parler à la caméra.

Myriam retient une leçon de ces campements.

J'ai découvert l'entraide, la solidarité, la bienveillance, dit-elle. Nous sommes tous d'origines différentes, mais à travers ce combat, nous nous sommes découverts, nous avons échangé, et je me rends compte que c'est possible de vivre en communauté, en paix.

Division chez les démocrates

Les deux tiers des Américains estiment que Joe Biden a mal géré le conflit israélo-palestinien. Au sein du Parti démocrate, les progressistes comme le sénateur Bernie Sanders – dont la famille a été éliminée durant l’holocauste – réclament un cessez-le-feu permanent et s'opposent à l'aide militaire de près de 9 milliards de dollars que les États-Unis versent à Israël.

N’insultez pas l’intelligence du peuple américain en tentant de les distraire de la guerre illégale et immorale de votre gouvernement extrémiste et raciste, ajoute-t-il.

2024-05-05T14:10:32Z dg43tfdfdgfd